Contrairement à une idée reçue, la plupart des handicaps surviennent à l’âge adulte. Si certains sont visibles, dans 80 % des cas, ils sont imperceptibles. Une invisibilité qui n’est pas sans poser problème dans le monde du travail. Faut-il parler de son état de santé à son employeur et à ses collègues ou, au contraire, taire sa situation, au risque de ne bénéficier d’aucune aide ni aménagement de travail ? Un dilemme pour certains salariés victimes d’un handicap invisible qui, parfois, ignorent même qu’ils peuvent bénéficier du statut de travailleur handicapé, y compris en l’absence de handicap sensoriel ou moteur.
Qu’est-ce qu’un handicap invisible ?
On a souvent tendance à croire que le handicap se résume à marcher avec une canne ou se déplacer dans un fauteuil roulant. À tort. Dans la majorité des cas, le handicap est imperceptible au premier regard. Sur 12 millions de personnes en situation de handicap dans l’Hexagone, plus de 9 millions souffrent d’un handicap invisible, bien souvent en raison d’une maladie chronique (cancer, dépression, maladie auto-immune, épilepsie, etc.).
La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances souligne ainsi qu’au-delà des seuls handicaps moteurs ou sensoriels, « toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions […] mentales, cognitives ou psychiques, […] ou d’un trouble de santé invalidant » constitue un handicap.
Faut-il avertir son employeur ou le médecin du travail ?
Légalement, rien n’oblige un salarié à révéler son handicap à son employeur, son supérieur hiérarchique ou au médecin du travail. Cela explique que, par déni ou par peur d’être stigmatisées, de nombreuses personnes concernées par un handicap invisible taisent leur situation à leur employeur ou futur employeur, même lorsque leur état de santé a des répercussions sur leur vie professionnelle.
Problème : elles se privent des mesures et des aides prévues par la loi pour leur permettre de poursuivre leur activité professionnelle, faire évoluer leur poste de travail ou accéder à un nouvel emploi.
En mars 2023, interrogée par le journal Le Monde, Simona Burgio De Simone, en charge de la mission handicap nationale de la Sécurité sociale, soulignait par ailleurs que révéler son handicap sur son lieu de travail permettait « d’exprimer ses besoins, comme arriver plus tard le matin pour aller chez le kiné [par exemple] ». Mais aussi de « lever toute ambigüité quant à son attitude : elle n’est pas fainéante ou démotivée, mais fatiguée par son traitement. »
Pourquoi faire reconnaître son statut de travailleur handicapé ?
Que l’on soit à la recherche d’un emploi ou déjà en poste, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) donne droit à des aides spécifiques. Elle est accordée à « toute personne dont les possibilités d’obtenir ou de conserver un emploi sont réduites par suite de l’altération d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales ou psychiques ».
Elle permet notamment de bénéficier des mesures suivantes :
- Dispositifs dédiés à l’insertion professionnelle (stages de réadaptation ou de rééducation, contrats d’apprentissage…).
- Aménagement de concours de la fonction publique ou recrutement contractuel spécifique.
- Obligation d’emploi d’au moins 6 % de travailleurs handicapés dans les secteurs public et privé pour toutes les entreprises de plus de 20 salariés.
- Aménagement du poste de travail et/ou du temps de travail.
- Bonification pour les salariés de 300 euros par an du compte personnel de formation (CPF), dans la limite d’un plafond annuel de 800 euros et d’un plafond total de 8 000 euros.
- Doublement la durée du préavis légal en cas de licenciement (trois mois au maximum).
La RQTH donne également accès aux aides financières de l’Association nationale de gestion des fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) :
- Aides à l’aménagement du poste de travail.
- Participation à l’acquisition d’aides techniques (appareillage auditif ou visuel…).
- Aides à la mobilité (aménagement du véhicule).
Comment obtenir la RQTH ?
La demande de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé se fait auprès de la Maison départementale des personnes handicapée (MDPH) de son lieu de résidence. Le dossier est ensuite étudié par la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) qui statue sur sa validité au regard des pièces dont il dispose.
En cas de difficultés administratives, il est possible de se faire aider par le médecin du travail, son médecin généraliste, une assistante sociale ou le service des ressources humaines de son entreprise.
À noter : les titulaires de l’Allocation adulte handicapé (AHH), d’une rente accident du travail ou d’une pension d’invalidité sont reconnus comme handicapés et, de ce fait, n’ont pas besoin de solliciter une RQTH.